Voilà les répercussions de l’inflation sur les étudiantes et étudiants partout au Canada
Voilà les répercussions de l’inflation sur les étudiantes et étudiants partout au Canada

Pour un grand nombre d’étudiantes et d’étudiants, l’automne dernier était la première fois qu’ils revenaient à une salle de cours physique depuis 2020. Si les obstacles financiers représentaient un problème avant la pandémie, le fardeau n'a fait que croître de façon exponentielle. Nous parlons de hausses des frais de scolarité, lesquels montent en flèche alors que le gel de la pandémie a décidément fondu, mais aussi, tout coûte plus cher maintenant. C'est le résultat d’un taux d'inflation record (le plus élevé depuis quarante ans!), qui a entraîné une hausse des prix de presque tout dans le pays. Les cours en présentiel entraînent des dépenses supplémentaires – entre autres, devoir déménager, payer un loyer, faire l’épicerie, accéder aux transports – et les étudiantes et étudiants en font les frais. Alors, que se passe-t-il? Et comment abordons-nous ce problème?

L’inflation est l’augmentation générale du prix des biens et services au fil du temps. Lorsque les prix grimpent, particulièrement lorsque cela se produit rapidement comme en 2022, nous obtenons moins qu’auparavant pour chaque dollar dépensé. Notre coût de la vie augmente, alors que nos revenus stagnent, ce qui place de nombreuses personnes dans une situation financière précaire. « Les étudiantes et étudiants en général paient beaucoup plus qu’avant, non seulement pour leurs frais de scolarité, mais aussi pour leurs frais de subsistance, comme les prix du loyer et de la nourriture, par rapport à ce qu'ils payaient avant la pandémie, en 2019, explique Nicole Schmidt et, pourtant, les revenus et les autres sources d'aide financière aux étudiantes et étudiants, comme les subventions et les bourses, n'ont pas augmenté proportionnellement. »

Pourquoi cela se passe-t-il maintenant? Bref : c’est à cause de la pandémie. En fait, au cours des trois dernières années, nous avons constaté une diminution de la production en raison de la COVID‑19, de la pénurie de travailleuses et travailleurs (c'est-à-dire des personnes qui ne sont plus disposées à travailler dans des conditions dangereuses pour un faible salaire) et des problèmes de chaîne d'approvisionnement. Mais alors que l'offre était relativement faible, la demande n'a pas fléchi. En retour, cela a permis aux entreprises de faire payer plus cher leurs produits (notamment une bonne vieille arnaque des prix), et les gens n'ont d'autre choix que de payer le prix exigé pour avoir accès aux produits de première nécessité.D'autres facteurs ont également joué un rôle important, notamment la hausse des prix du pétrole et l'augmentation de la bulle immobilière.

Au Canada, nous avons vu grimper les prix d'à peu près tout, de l’épicerie aux services de garde d’enfants, sans oublier l’essence. Au cours de la dernière année, les prix des aliments ont augmenté de 9,7 pour cent et le logement de 7,4 pour cent. Les étudiantes et étudiants sont obligés de prendre des mesures extrêmes pour combler le fossé. Une étude de l’Université Dalhousie montre que les gens sont tenus d’acheter moins d’épicerie, de changer leurs habitudes alimentaires ou de sauter complètement des repas. Les universités de toutes les régions du pays ont constaté une hausse marquée du nombre d’étudiantes et d’étudiants qui connaissent l’insécurité alimentaire, ont accès aux banques alimentaires et aux fonds d’urgence du campus. « Nous distribuons autant de paniers par semaine que nous en donnions par mois pendant l'année scolaire 2019-2010 », a déclaré Erin O'Neil, directrice générale de la banque alimentaire du campus de l'Université de l'Alberta.  Ils ont maintenant recours à la création de placards de secours remplis de collations gratuites et d'articles d'hygiène et de toilette. Bien que cela puisse aider les étudiantes et étudiants à tenir le coup pour le moment, ce n'est pas une solution à long terme à ce problème systémique. Pour beaucoup, cela signifie qu'ils devront abandonner complètement leurs études. Dans une étude récente, quarante pour cent des étudiantes et étudiants interrogés ont déclaré qu'ils envisageaient d'abandonner leurs études. 

En fin de compte, comme dans toute crise économique, ceux qui font déjà face à des obstacles sont le plus durement touchés. « Ce sont ceux qui sont au bas de la chaîne alimentaire qui finissent par le ressentir le plus », a déclaré Olufunke Adeleye, présidente de la Brandon University Students' Union, au Manitoba. Les étudiantes et étudiants racialisés et ceux issus de milieux à faible revenu sont touchés de manière disproportionnée. Selon Rachel Samson, vice-présidente de la recherche à l'Institut de recherche en politiques publiques, environ 60 à 70 pour cent des locataires à faible revenu des grands centres urbains consacrent plus de la moitié de leur revenu au loyer, ce qui laisse peu de marge de manœuvre pour payer la nourriture et les autres dépenses. Cette situation est exacerbée par les différentes intersections d'oppression auxquelles les gens font face : « Le taux de pauvreté parmi les minorités visibles est presque le double de celui des minorités non visibles. Pour certaines ethnies, il est trois fois plus élevé que celui des minorités non visibles. »

Les étudiantes et étudiants internationaux sont particulièrement en difficulté. Faisant déjà face à des frais de scolarité beaucoup plus élevés (jusqu'à cinq fois ce que paient les étudiantes et étudiants canadiens, avec une hausse de huit pour cent cette année seulement) et ne pouvant pas travailler plus de 20 heures par semaine dans des emplois hors campus, beaucoup d'entre eux sont à court d'options. « Nous n’avons pas beaucoup de possibilités d’emploi, a déclaré Ahmed Hassan, un étudiant international de l’Université de Windsor. En qualité d’étudiantes et d’étudiants, lorsque nous sommes arrivés ici si tôt, nous avions prévu nos propres finances, mais l'inflation et les prix élevés nous causent tellement de problèmes en ce moment. »

Avec l'augmentation de l'inflation, les centres alimentaires partout au pays constatent également une augmentation du nombre de visiteurs parmi les étudiantes et étudiants internationaux, qui comptent sur les banques alimentaires en tant qu'élément essentiel de l'approvisionnement en repas nutritifs et abordables. « C'est un service idéal pour les étudiantes et étudiants parce que nous avons du mal à trouver de l'argent au début, a déclaré un étudiant de l'Université de Windsor, Dipan Sharma. Ça nous sauve la vie. » 

Bien que des services comme les banques alimentaires soient importants et s'avèrent maintenant essentiels à nos communautés, les solutions individuelles ne régleront pas un problème systémique.Nous devons demander à nos établissements de tenir compte du coût de la vie lorsqu’ils déterminent les frais de scolarité, et de fournir un soutien adéquat à celles et ceux qui connaissent des difficultés. Cela inclut un accès accru à l'aide financière, sans augmentation des taux d'intérêt. L'éducation postsecondaire devrait être accessible à toutes et tous, quels que soient leur milieu social, leurs revenus ou leur nationalité.

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